Lâcher prise – Prendre pied

 IMG_3205.jpgEn avril 2016, nous arrivions au bout de nos contrats de travail et nous n’avions aucune envie de replonger dans le monde du travail «classique». Pas que nous n’étions pas bien à nos postes : collègues sympas, missions variées, petites
perspectives d’évolution et pas de mal-être apparent. Juste la sensation de ne pas être véritablement à nos places et l’impression que nos compétences pourraient être plus utiles ailleurs.

 Alors nous nous sommes un peu encouragées mutuellement : l’idée du voyage à vélo était tout d’abord l’envie de faire un diagnostic de la situation pour notre projet, Col-Vert. Cependant, plus nous roulons, plus nous nous rendons compte que nous entreprenons en fait ce que nous n’avions jamais pris le temps de faire auparavant : le diagnostic de notre situation.

Du côté de chez Filo

Dans ma tête résonne cette phrase que Samira, une entrepreneuse incubée à La Ruche, m’avait soufflée : « Vis ton rêve plutôt que contribuer à celui d’un autre ». Depuis des années je cours d’un job à l’autre pour contribuer à financer des études passionnantes mais longues, très longues. Cependant, avec mes deux masters en poche, un en recherche, l’autre « professionnel », je me dis que je n’ai toujours pas réellement trouvé ma passion. J’aime faire beaucoup de choses, du bricolage vélo à l’analyse de vieilles archives en passant par la restauration et l’équitation. Je me sens citadine mais à l’aise à la campagne, des fois d’ici, des fois d’ailleurs. J’adore les gens mais ai du mal avec la foule. Mais surtout, je rêve d’un monde plus juste, moins absurde, plus simple mais moins inégalitaire.

 Aujourd’hui, j’ai 30 ans et c’est la première fois que je m’arrête réellement, que je «lâche» tout pour trouver «mon truc». Beaucoup de mes amis l’ont fait bien avant moi. J’ai un peu de retard, mais qu’importe : je viens de terminer mes études et je me pose pour me demander ce que je veux faire. J’accepte enfin sans culpabiliser (parce que d’autres n’ont pas cette chance là) de ne pas «travailler».

Pourtant, je n’arrête pas : vélo, rencontres, écriture, gestion administrative. Je conseille l’expérience de la « pause de vie » à tout le monde : deux semaines, deux mois ou deux ans à réfléchir et, égoïstement, s’écouter. Pour repousser les craintes du lendemain, les cadres imposés pas la société, les doutes de l’entourage et pour laisser libre cours à ses véritables envies.

J’ai les idées un peu plus claires sur ce que j’aimerais faire : travailler dans un centre équestre, accueillir des gens fragilisés par la société et leur redonner le goût de la vie en leur donnant la possibilité de faire des activités sportives ou champêtres. Mais j’aimerais aussi pouvoir bouger, rencontrer du monde, être fédératrice. Tout ceci, au grand air, bien-sûr, et sans un sou d’investissement au départ. Si vous avez des pistes…

Et Allison ?

Pour ma part, je rentre de neuf mois à l’étranger avec le très grand désir de rester en France un moment mais aucune envie de chercher du travail. Je regarde les offres et rien ne m’attire. Mince, pourquoi devrais-je postuler à un poste qui ne me donne pas envie ! Puis Filo me dit : « Moi je monte mon projet, si ça te dit, tu en fais partie ». Ah bah oui tiens, pourquoi pas ! Pourquoi pas un projet qui me plait, un truc sur lequel j’ai mon mot à dire à toutes les étapes du processus et qui m’intéresse.

De toute façon, je n’avais pas envie de chercher du travail, alors je serais restée là, à ne rien faire ? Un tour à vélo de 5 mois me paraît bien plus adéquat. Parce qu’à vélo on cogite, tranquillement à notre rythme, on ne fait pas rien. D’expérience je sais que le rien entraine de plus en plus de rien, de la dépréciation, de la culpabilité… oulala bien trop de négativité.

Alors que moi j’ai envie de positif, de sourire, de contentement. J’ai envie de rire et d’être heureuse de ma journée. Une semaine que nous sommes parties et déjà tellement de personnes rayonnantes croisées. Des rencontres motivantes, positives et enrichissantes. D’une discussion à l’autre je reprends ce que je pensais, j’ajoute, je retire, j’adapte, j’ai l’impression que petit à petit je vais le trouver, ce truc qui me donnera envie de me lever tous les matins (ou pas, peut-être un jour sur deux ou une semaine sur deux, qui sait, on peut peut-être travailler autrement, à un autre rythme ! Ça aussi j’ai le temps d’y réfléchir, sur ma selle, entre deux coup de pédale). Parce que oui, finalement, le but de tout ça c’est de trouver ce travail, ou ces travails, ou une occupation qui me permettrait de rester heureuse.

Aujourd’hui, je ne me trouve correspondre à aucun profil de proposition de poste, pas assez spécialisée ou alors pas assez technique et pourtant, je suis capable de tout. Je le sais, j’apprends vite, je m’adapte vite, je m’intéresse. Mais où vais-je trouver ce poste qui dit : « Allez-y, faites vos armes, cet emploi est fait pour que vous trouviez votre voie ? ». Nulle part, alors je me le crée : je pars faire un tour des régions de France, à vélo, pendant 5 mois, avec une super pote, voilà. Et à la question « Et toi, qu’est-ce que tu fais en ce moment ? » c’est ce que je réponds. Non ce n’est pas rémunéré, mais oui, c’est un vrai travail. Un travail sur moi même, un travail de communication (des articles à écrire, des contacts à prendre, des subventions à trouver) et un vrai projet à mener au bout.

Et vous savez quoi ? Je suis heureuse.

 

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